Favia-favusUn virus pourrait être la clé de la bonne santé des coraux
Des chercheurs de l'université de Tel-Aviv développent une méthode de traitement du blanchiment des coraux basée sur la médecine humaine



Les coraux sont une partie inestimable de l'écosystème marin, en favorisant la biodiversité et la protection du littoral. Mais ils sont aussi de plus en plus en danger. Les bactéries pathogènes, ainsi que les pratiques de pêche nuisibles et la pollution, sont l'une des plus grandes menaces pour les populations de corail du monde d'aujourd'hui.

L'une des solutions à la crise réside peut-être dans la médecine humaine. Le professeur Eugène Rosenberg du département de microbiologie moléculaire et biotechnologie de l'université de Tel Aviv, en collaboration avec le Dr Ilil Atad de son propre laboratoire et professeur Yossi Loya du département de zoologie de la même université, a mis au point un traitement destiné à traiter les coraux infectés par Thalassomonas loyana, connus comme agent pathogène de la "maladie du blanchiment des coraux". Cette bactérie mortelle infecte 9% des coraux de l'espèce Favia favus (corail cerveau) sur le récif corallien d'Eilat en Mer Rouge et transmet facilement la maladie aux coraux sains se trouvant à proximité.

Le traitement fait appel à des virus qui infectent les bactéries en leur injectant du matériel génétique, une thérapie développée, à l'origine, pour traiter les infections bactériennes chez les l'homme. Dans ce cas, les chercheurs ont isolé un virus appelé BA3, appartenant à une catégorie de virus appelés phages. Des expériences en laboratoire ont montré que BA3 a la capacité de tuer la bactérie pathogène, ce qui a été démontré sur le terrain, dans le Golfe d'Eilat, puisque le traitement a stoppé la progression de la maladie chez les coraux infectés et empêché la propagation de la maladie aux coraux sains environnants.

Ces résultats ont été présentés à l'Assemblée générale de l'American Society for Microbiology, en Juin.

De la médecine humaine à la médecine marine
Le traitement des infections bactériennes chez les coraux n'est pas une tâche facile, les coraux ne produisant pas d'anticorps comme les humains. Ils ne peuvent donc pas être vaccinés. Les antibiotiques ne sont pas une option viable car le traitement libère les médicaments nuisible à l'environnement marin.

Les chercheurs ont appliqué leur traitement à deux groupes de coraux malades, chacun entouré d'un cercle de coraux sains. Dans le groupe test, les chercheurs ont injecté le virus à une concentration de 1000 par millilitre. Le groupe témoin n'a pas reçu le virus.

Après 24 heures, le résultat était hautement significatif, explique le professeur Rosenberg. Dans le groupe test, l'infection du corail malade a cessé sa progression et la maladie ne se propage pas aux coraux sains environnants. Dans le groupe témoin, la maladie progresse rapidement dans le corail d'origine infecté et se propage à sept sur dix des coraux sains environnants.

Amplifier un processus naturel
Une des découvertes les plus surprenantes au cours des recherches, explique le professeur Rosenberg, a été que certains coraux possèdent naturellement le virus bénéfique et sont déjà résistants à l'infection par la bactérie pathogène. Lorsque les chercheurs ont testé les trois coraux dans le groupe témoin non infecté qui restait, ils ont découvert que le virus était déjà présent dans leur composition biologique. «Nous avons constaté qu'il s'agit d'un processus naturel permanent. Ce que nous faisons n'est qu'aider le virus à gagner du terrain», explique t-il.

Pour le professeur Rosenberg, cette méthode d'élaboration d'un antidote à certaines bactéries pathogènes du corail est une percée cruciale. Les coraux de différentes régions du monde sont infectés par des agents pathogènes différents. Pour chaque région, il sera nécessaire d'isoler le virus approprié. Mais les microbiologistes devraient être en mesure de développer des traitements régionalisés en fonction des méthodes utilisées par le professeur Rosenberg et ses collègues chercheurs.

L'étape suivante consiste à élaborer un moyen efficace pour diffuser des virus sur toute la surface d'un récif de corail infecté. Des quantités suffisantes de ces virus peut être facilement fabriquées en laboratoire. Après cela, c'est une question de technologie et de financement, ajoute le professeur Rosenberg.

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Traduction du texte original en anglais paru sous le titre "Viruses Could be the Key to Healthy Corals" sur le site  "American Friends Tel-Aviv University"

Photo : Favia favus (Corail cerveau) - Récif France