code civilStatuts des animaux : pas de modification fondamentale
Les animaux sont désormais officiellement considérés comme des « êtres vivants doués de sensibilité ». Cette proposition était intégrée dans le projet de loi de modernisation et de simplification du droit. Supprimée par les Sénateurs le 22 janvier elle a pourtant été adoptée définitivement, en dernière lecture, par les Députés, le 28 janvier (les Députés UMP ont voté contre, ceux du Front de gauche se sont abstenus). Elle sera donc incluse dans le Code civil après plusieurs mois de débats et, c'est regrettable, sans consultation des organisations concernées.

À noter que ce statut d'êtres vivants doués de sensibilité est déjà reconnu par le code rural.

Fort heureusement, et contrairement à ce que souhaitaient certaines associations, les catégories juridiques fondamentales ne sont pas bouleversées : il n'y a pas création d'une nouvelle catégorie entre les personnes et les biens.
Il s'agit surtout d'une harmonisation entre le Code rural et le Code civil et non cette « révolution » qui a pu être évitée grâce à la mobilisation de tous les éleveurs y compris ceux regroupés au sein de ProNaturA France dont notre Fédération.

Au regard du Code civil, les animaux restent donc des biens et ne possèdent pas (encore ?) de statut propre.
C'est un moindre mal tant il est vrai que la création d'une nouvelle catégorie (voire l'égalité homme/animal comme le souhaitaient certains radicaux) aurait immanquablement porté préjudice à tous les éleveurs animaliers en entraînant de nombreux conflits juridiques.

Le nouvel article sera ainsi rédigé : « Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont tous soumis au régime des biens ».

Il est évident que nous ne contestons pas, loin de là, l'absolue nécessité de lutter contre la maltraitance animale, y compris, bien entendu, à l'encontre des espèces aquatiques. Les éleveurs sont de toute façon, et c'est absolument indéniable, les premiers à aimer, à protéger et respecter leurs animaux.

Jouant sur les mots, certains affirmaient, preuve de leur malhonnêteté intellectuelle, que l'animal n'était rien d'autre qu'un « meuble » parce que classé dans la catégorie des « biens meubles ». Or un « bien meuble », par opposition à un « bien immeuble » est un bien qui peut être déplacé, ce qui, nous semble-t-il, est tout à fait le cas de l'animal !
Celui-ci était, et est toujours, protégé. Casser volontairement un pied de table n'entraînera aucune conséquence judiciaire. Casser volontairement une patte à un animal, même s'il vous appartient, entraînera automatiquement une action en justice. Et c'est tout à fait normal !

Entre les deux extrêmes que représentent « l'animal machine » et « l'animal sujet de droits », prônons un juste milieu : l'animal objet de devoirs de la part de l'Homme. Ces devoirs doivent être définis selon une conception non anthropomorphiste et humaniste de la protection animale. Pour les aquariophiles, la protection des animaux doit signifier deux choses : l'assurance d'une bientraitance au niveau des installations, de la nourriture et des soins, mais aussi protection contre leur disparition en tant qu'espèces voire variétés.

Nous ne pouvons pas laisser les protecteurs radicaux parler et agir seuls au nom de la protection animale quels que soient ces animaux. En ce qui concerne l'aquariophilie, seuls les aquariophiles, par leurs connaissances, par leur passion, parce qu'ils maitrisent leur discipline, sont à même de déterminer si le bien-être de leurs pensionnaires est respecté.

Mais il est évident que, cette évolution juridique servira de tremplin à certaines associations extrémistes pour d'autres propositions qui deviendront de plus en plus restrictives. Car si elles estiment avoir remporté une (demi) victoire, elles ont déjà fait savoir qu'elles poursuivront leurs efforts pour qu'un « chantier » plus vaste soit entrepris.

Afin de prouver leur implication, les associations aquariophiles et leurs membres doivent absolument s'impliquer davantage sur l'aspect du « bien-être animal ».
Deux exemples :
• Au niveau de l'information lors des bourses : les qualités physico-chimiques de l'eau, le type de nourriture, les conditions de maintenance ... devraient être systématiquement mentionnées sur les bacs de vente. Ces informations sont souvent connues par les passionnés ; mais pour l'aquariophile lambda ?
• Par l'obtention du certificat fédéral de compétences : pour démontrer que les aquariophiles sont responsables, connaissent les besoins fondamentaux des espèces qu'ils élèvent, pratiquent une aquariophilie « durable » et qu'ils ne sont pas, notamment lors des bourses, que des « vendeurs de poissons ».

La Fédération sera particulièrement vigilante envers tout problème que pourra rencontrer un aquariophile fédéré afin de prévenir tout abus juridique, comme cela a été le cas pour des récifalistes dans le passé.

Nous reproduisons ci-dessous des extraits des débats qui ont amené l'adoption de cet article.

Le Conseil d'administration FFA



Mme Colette Capdevielle, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Madame la présidente, madame la garde des sceaux, ministre de la justice, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, nous sommes saisis en lecture définitive du projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures, à la suite, malheureusement, de l'échec de la commission mixte paritaire qui s'est déroulée le 13 mai 2014.
Le Sénat a également supprimé l'article 1er bis relatif au statut juridique des animaux dans le code civil, qui reconnaît, enfin, la qualité d'être sensibles de ces derniers et qui, au lieu de les assimiler à des biens, les soumet à leur régime juridique. Le Sénat a considéré que cette disposition ne présentait pas un lien suffisant avec l'objet initial du texte.
C'est une analyse que nous ne partageons pas. Le projet de loi déposé par le Gouvernement comporte justement un article 4 relatif à l'abrogation des actions possessoires, afin de moderniser le droit des biens, conformément aux préconisations du rapport de la commission présidée par le professeur Périnet-Marquet dans sa proposition de réforme du livre II du code civil relatif au droit des biens.
L'article 1er bis poursuit le même objet, la modernisation du droit des biens, et répond également à l'une des préconisations du rapport Périnet-Marquet. Il ne fait donc aucun doute qu'il présente un lien étroit avec l'objet initial du texte.
Dans ces conditions, il apparaît que le désaccord persistant entre les deux chambres ne peut être tranché qu'en donnant aujourd'hui le dernier mot à notre assemblée, comme le permet notre Constitution. Le Gouvernement a ainsi demandé à l'Assemblée nationale de trancher définitivement. C'est ce que nous allons faire aujourd'hui, en lecture définitive, en reprenant le texte que nous avions voté en nouvelle lecture sous réserve de la reprise de quatre amendements rédactionnels adoptés par le Sénat.(Applaudissements sur quelques bancs du groupe RRDP.)

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Très bien !


DISCUSSION GÉNÉRALE
Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Madame la présidente, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, mes chers collègues, à l'issue de l'examen de ce texte par le Sénat, nous voici amenés à discuter, pour la troisième et dernière fois, du projet de loi relatif à la modernisation du droit et des procédures dans le domaine de la justice.
Au cours de ces différentes lectures, les parlementaires ont tous reconnu la nécessité, dans un contexte d'inflation législative, de simplifier notre arsenal juridique. Mais nous savons aussi combien la tâche est délicate. L'exercice de simplification nous impose en effet de légiférer sur des textes aux dispositions diverses, dans des domaines très différents.
Ce projet de loi n'échappe pas à la règle et les sujets qu'il recouvre – droit civil, droit des successions ou encore droit des obligations – sont vastes. En outre, lorsque le législateur entreprend de simplifier le droit, il doit prendre garde à ne pas dévoyer ce simple exercice en une réécriture complète.
Ce projet n'a pas su éviter cet écueil. Je pense notamment à l'apparition, au détour d'un amendement en première lecture, de l'article 1er bis relatif au statut juridique de l'animal. On peine à voir la cohérence de cette mesure avec le reste du texte. De toute évidence, elle aurait mérité une étude plus approfondie, une consultation préalable des professionnels concernés et une prise en compte du travail parlementaire effectué par le groupe d'études sur la protection des animaux. Elle aurait pu figurer dans un texte où elle aurait eu réellement sa place.
Cette disposition aura constitué l'un des points de désaccord entre les deux chambres lors de l'examen du texte en CMP. Notre assemblée ayant le dernier mot, l'article 1er bis figure toujours dans le texte que nous examinons aujourd'hui. Nous le regrettons.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à l'occasion de la lecture définitive de ce projet de loi, le groupe GDR confirme tout d'abord l'appréciation positive qu'il porte sur plusieurs de ses dispositions, qui permettent d'alléger les contraintes qui pèsent souvent sur les administrations et de faciliter l'accomplissement de formalités par nos concitoyens.
Par ailleurs, nous soutenons la clarification du statut juridique des animaux dans le code civil, conformément à celui déjà inscrit dans les codes rural et pénal. Nous approuvons ainsi le bon compromis qui a abouti à la consécration de l'animal en tant que tel dans le code civil, qui permet de mieux concilier la nécessité de qualifier juridiquement l'animal et sa qualité d'être sensible, sans pour autant en faire une catégorie juridique nouvelle entre les personnes et les biens.
Mme Cécile Untermaier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, bien que le présent texte ait l'ambition de simplifier et de moderniser notre justice ainsi que nos affaires intérieures, son parcours parlementaire n'a, et ce n'est rien de le dire, pas été simple. Nous n'avons en effet pas pu nous mettre complètement d'accord avec le Sénat.
Je souhaite centrer mon propos sur cinq sujets. L'article 1er bis d'abord, relatif au statut des animaux, est issu d'un amendement porté en avril dernier par Jean Glavany, ici présent, et plus largement par l'ensemble du groupe SRC. Cet amendement, de pure forme, est rapidement devenu le cœur de cette loi et a concentré de nombreuses critiques.
Pourtant, et nous sommes nombreux à le répéter depuis avril dernier, cette disposition se borne à préciser que les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Qui peut nier cette évidence ? Qui peut soutenir que les animaux ne sont pas doués de sensibilité ? Même le code rural et de la pêche maritime le reconnaît, dans son article L. 214-1. C'est d'ailleurs pour aligner les dispositions du code civil sur cette législation que l'amendement a été voté au printemps dernier. En harmonisant les législations relatives aux animaux, nous prévenons toute interprétation divergente de la part du juge. C'est cela aussi, simplifier.
Voici ce que prévoit dorénavant cet article : « Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens. ». En supprimant le terme « corporels », nous avons levé toute ambiguïté. Le régime juridique applicable aux animaux est celui qui est applicable aux biens, à savoir le régime des biens meubles ou immeubles par destination. En bref, aucun bouleversement juridique d'ampleur n'est à attendre de cette rédaction.
Le Sénat a refusé de voter cette mesure législative d'harmonisation entre les textes.

M. Jean Glavany. Il a eu tort !

Mme Cécile Untermaier. Nous, nous faisons le choix de la simplification, et c'est pour cela que je vous invite, mes chers collègues, à valider le travail que nous avons mené sur cet amendement.
(...)

M. Philippe Gosselin. Pour finir, je veux revenir sur un point plus anecdotique, le statut des animaux. On nous a présenté ce texte de simplification comme concernant la justice et les affaires intérieures. Or, à l'article 1er bis, un amendement a été présenté le matin en commission des lois pour un examen en séance publique le soir même, sans qu'aucune concertation n'ait lieu. Le nouvel article modifie profondément le droit applicable, puisqu'il définit l'animal comme un « être vivant doué de sensibilité » et lui confère donc un statut spécial qui risque d'avoir des conséquences majeures.

M. Marc Le Fur. C'est le problème !

M. Philippe Gosselin. Il ne s'agit certes pas de s'opposer à une reconnaissance du caractère sensible de l'animal, comme cela apparaît depuis plus de trente ans dans le code rural. Le respect du bien-être animal constitue d'ailleurs la priorité des éleveurs. Il ne s'agit pas non plus de remettre en cause la place particulière des animaux de compagnie qui peut justifier l'ouverture d'un débat et, pourquoi pas, l'introduction d'une nouvelle catégorie juridique. Il ne s'agit pas plus de limiter la lutte légitime contre la maltraitance des animaux.
Mais il paraît très hasardeux d'insérer dans le code civil un statut de l'animal. En effet, la formule de l'article 1er bis, telle qu'elle est actuellement rédigée, remet bien en cause, au lieu d'opérer une simplification, la classification traditionnelle du code civil concernant les biens, sans préciser plus clairement à quelle catégorie les animaux appartiennent. Elle risque donc d'entraîner une confusion et, partant, des conflits juridiques.

Mme la présidente. Merci de conclure, monsieur Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Je crois que c'est l'ensemble des éleveurs et des agriculteurs qui risquent d'en être les victimes.

M. Marc Le Fur. Très bien !

Mme la présidente. La discussion générale est close.

TEXTE VOTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE

Mme la présidente. J'appelle maintenant, conformément à l'article 114, alinéa 3, du règlement, le projet de loi dans le texte voté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.
J'appelle l'Assemblée à statuer d'abord sur les amendements dont je suis saisie.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 5 et 6, portant sur l'article 1er bis.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l'amendement no 5.

M. Philippe Gosselin. Cet amendement va me permettre de dire ce que je n'ai pas eu le temps de dire en discussion générale. L'article 1er bis pose un vrai problème. Comme je le disais tout à l'heure, il a été introduit un peu en catimini par notre collègue Jean Glavany. Or il faudrait sur ce sujet avoir une vraie et large concertation avec les professionnels des filières agricoles et industrielles, mais aussi avec les laboratoires, les chasseurs et autres. Il faudrait prendre la mesure de toutes les conséquences que cette rédaction emporte. J'ai l'impression que cela n'a pas été le cas. Demain, c'est l'agriculture qui pourrait être menacée, ou encore l'industrie, la chasse à courre,...

M. Jean-Frédéric Poisson. La pisciculture !

M. Philippe Gosselin. La pisciculture, nous dit M. Poisson, à dessein ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Et qu'en dit M. Goujon ?

M. Philippe Gosselin. Si le code civil doit évoluer pour prévoir un nouveau statut de l'animal, cela ne peut se faire qu'après une réflexion globale sur le droit des biens, et non pas en catimini comme c'est le cas ici. Encore une fois, nul ne conteste la nécessité de lutter contre la cruauté et la maltraitance à l'égard des animaux. Tout le monde reconnaît la légitimité de ce combat. Cependant, cet article fait franchir une étape supplémentaire dont les effets ne sont pas évalués. C'est cela qui fait craindre le pire. Si mon amendement n'est que de suppression, c'est qu'à ce stade de la procédure, je ne peux pas vous soumettre un amendement de proposition, ce que j'aurais évidemment préféré. Quoi qu'il en soit, cet article, loin de résoudre des problèmes, en crée.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l'amendement no 6.

M. Marc Le Fur. Philippe Gosselin a parfaitement présenté la situation. Le problème n'est pas de légiférer sur l'animal, mais de le faire dans le code civil, qui est le code de la personne et des relations personnelles, et du droit de propriété. Nous légiférons sans avoir organisé une quelconque concertation avec les éleveurs, qui sont choqués. Ils savent que cette évolution juridique sera utilisée demain par les adversaires de l'élevage pour contester certaines activités. Et j'exclus de mon propos les questions de gavage, d'élevage traditionnel, de corrida ou de chasse : l'élevage économique lui-même peut être remis en cause par une telle disposition.
Paradoxalement, cette remise en cause interviendrait au moment même où des efforts considérables ont été réalisés en faveur du bien-être animal. J'en veux pour preuve ce qui s'est passé avec les porcs et les truies, qui sont désormais libres de leurs mouvements dans leurs stalles, ou encore avec les poules pondeuses, dont l'espace s'est sensiblement élargi, passant à 700 centimètres carrés alors qu'elles étaient auparavant très confinées. Ces évolutions ont coûté très cher aux éleveurs. Sans en faire tout une histoire, ils ont investi, ils ont fait bouger les choses et ils se sentent aujourd'hui mis en cause par les évolutions dont la majorité a pris l'initiative. Certes, nous sommes dans une forme de compromis et nous avons évité des choses bien pires. Il n'en demeure pas moins que cette disposition est redoutable.
Je veux, pour finir, prendre un exemple qui fera la preuve de la bonne volonté des éleveurs : ce sont les professionnels de l'élevage qui sont à l'origine de la création d'un cahier des charges pour rendre les transports plus cohérents et plus respectueux de l'animal. Ce cahier sera adopté au niveau national et européen. Ils ne nous ont pas attendus pour le faire : sachons reconnaître leur initiative.

Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Capdevielle, rapporteure, pour donner l'avis de la commission.

Mme Colette Capdevielle, rapporteure. Je serai brève, parce que nous avons déjà eu de nombreux échanges sur ce sujet et que nous ne pouvons que nous répéter. Le but de cet article est de moderniser le code civil afin de le mettre en cohérence avec les dispositions du code rural et celles du code pénal, puisqu'il n'y avait pas dans notre code civil de définition juridique précise des animaux. Nous rapprochons ainsi le droit français des autres législations européennes, comme en Allemagne, en Suisse ou en Autriche, sans nullement remettre en cause quelque équilibre que ce soit dans notre code civil.

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Absolument !

Mme Colette Capdevielle, rapporteure. Surtout, il n'y a aucun risque de confusion, monsieur Gosselin, puisqu'il ne s'agit que d'une modernisation et d'une mise en conformité de notre code civil avec la législation de l'Union européenne, laquelle reconnaît les animaux comme des êtres sensibles, dans l'article 13 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Les distinctions traditionnelles du code civil sont toujours les mêmes : les personnes et les biens. Rien n'est modifié. Nous ne créons pas une catégorie juridique sui generis qui s'appliquerait aux animaux. Le régime juridique qui leur est applicable est toujours le même : celui des biens. Les règles relatives à la propriété restent exactement les mêmes et elles continueront de s'appliquer à l'animal, qu'il s'agisse de vente ou de succession. L'agriculture n'est pas touchée, pas plus que l'élevage, la pisciculture, la chasse, la pêche, la consommation de viande ou les pratiques d'élevage, d'abattage, de gavage et de corrida, lesquelles sont aujourd'hui toutes conformes aux textes en vigueur. Ce n'est donc pas la peine de chercher à vous faire peur.

M. Marc Le Fur. À quoi cela sert-il alors ?

Mme Colette Capdevielle, rapporteure. Rien n'est remis en cause. Ce texte ne pose aucune difficulté. Et, comme me le souffle le président de la commission des lois, vous faites preuve ici d'un sacré conservatisme... (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, pour donner l'avis du Gouvernement.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Il est défavorable. Nous avons déjà eu ce débat à deux reprises. Il a été approfondi, de part et d'autre. Il y a incontestablement un désaccord et une divergence d'appréciation, que nous assumons de part et d'autre aussi. Nous souhaitons maintenir cette disposition dans le texte.

M. Philippe Gosselin. C'est un problème de conséquences !

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Lefebvre.

M. Frédéric Lefebvre. De fait, nous avons déjà eu un long débat à ce sujet. C'est Jean Glavany qui a déposé cet amendement, sur lequel beaucoup de nos collègues s'accordent, sans qu'il y ait toutefois unanimité. J'avais moi-même déposé une proposition de loi en ce sens et nous sommes nombreux à avoir signé de telles propositions de loi, venant de tous les bancs de cet hémicycle.
Une argumentation assez fréquente vise à jouer sur les peurs. Je comprends qu'un certain nombre de nos compatriotes puissent en éprouver, et il faut donc que nous les rassurions ensemble – Mme la rapporteure a commencé à le faire. Cet article propose une simplification, sans laquelle il y a une incohérence entre le code rural et le code civil. Or le code rural s'applique à nos amis agriculteurs, qui, Marc Le Fur l'a parfaitement rappelé, ont fait évoluer leurs pratiques, parfois même en avance sur d'autres acteurs de la société française. Il n'y a donc aucune inquiétude à avoir du fait que le droit civil soit aligné sur les dispositions qui existent déjà dans le code rural !
Notre devoir à tous est de rassurer nos compatriotes aujourd'hui inquiets. Je regrette évidemment que nous soyons amenés à recommencer ce débat, et surtout qu'il n'y ait pas eu de vote conforme au Sénat sur cette disposition qui a toute sa place dans le texte.

Mme la présidente. Merci, monsieur Lefebvre...

M. Frédéric Lefebvre. Je conclus en soulignant combien il est important de notre part à tous, alors que la fondation 30 millions d'amis a été à l'origine d'une pétition signée par au moins 250 000 personnes et que de nombreux intellectuels ont rappelé la grande incohérence dans notre droit sur le sujet, de corriger cette erreur.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Glavany.


M. Jean Glavany. L'argument d'une modification introduite en catimini me fait sourire : ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas un habitué du catimini ! Nous avons procédé en respectant le règlement de l'Assemblée nationale, à toutes les étapes de la procédure.
Quant à l'argument sur l'absence de débat, je rappelle que nous ne cessons de débattre de ce sujet, depuis des mois, et qu'à chaque fois on regrette qu'il n'y ait pas eu de débat ! Non, il y a bien eu un débat de fond,...

M. Philippe Gosselin. Pas avec les professionnels !

M. Jean Glavany. ...que vous poursuivez encore aujourd'hui, avec un acharnement que je n'oserai qualifier de thérapeutique.
S'agissant de la concertation, elle a eu lieu. Frédéric Lefebvre, qui a parlé avec une sagesse remarquable à laquelle je tiens à rendre hommage, ce qui prouve mon absence totale de sectarisme (Sourires), a évoqué l'appel de vingt-quatre intellectuels de très haut rang, qui nous ont invités à corriger une incohérence, et la pétition lancée par une grande fondation, qui a recueilli des centaines de milliers de signatures, sans compter le sondage montrant que 90 % des Français sont favorables à cette disposition.
Si vous n'avez pas mené de concertation avec les éleveurs et la FNSEA, moi, je l'ai fait. J'ai eu une conversation avec le président de la FNSEA, parce qu'il est vrai qu'il existait une inquiétude, et celle-ci a été ainsi balayée.
Cet article a toute sa place dans ce projet, parce que c'est une disposition d'harmonisation, de simplification et de cohérence. Beaucoup l'ont dit, à commencer par notre rapporteure avec beaucoup de pertinence : il y avait une incohérence entre le code civil, le code pénal et le code rural, et nous y mettons fin. C'est une avancée modeste en termes de droit, mais de grande portée symbolique.
Et le droit peut aussi, de temps en temps, relever du symbolique pour faire avancer les idées.


(Les amendements identiques n° 5 et 6 ne sont pas adoptés.)